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Texte de présentation de l'artiste Maria Fynsk Norup

Annelise Stern | Décembre 2022

 Le bruit du vide 

Les artistes sont les meilleurs narrateurs au monde. C’est la première pensée qui m’a traversé l’esprit quand j’ai découvert le travail de Maria Fynsk Norup. J’ai présenté beaucoup d’artistes photographes dans ma curation. Sans doute parce que j’ai toujours été fascinée par le pouvoir émotionnel des images. On dit souvent qu’une image vaut mille mots. C’est bien vrai. Moi je ne suis là que pour broder, mais le plus important est déjà sous vos yeux.

Maria Fynsk Norup (née en 1975) est une photographe d'art primée, qui vit et travaille sur la petite île d'Ærø, à l'extrême sud du Danemark. Au fil de ses œuvres elle déroule un récit narratif dans lequel elle parle de l'exploration de la féminité, de l'interconnexion entre l'être humain et la nature, et du droit à une place dans le monde. Un récit écrit à la première personne, où elle utilise essentiellement l'autoportrait comme médium artistique. L'artiste ou ses personnages prennent place dans des compositions au style dépouillé. C'est sobre, on se concentre sur l'essentiel. Les tons gris bleus de ses photographies nous donnent comme l'impression de plonger dans une version contemporaine des toiles de Vilhelm Hammershøi. Et promis, ce n'est pas parce c'est le seul peintre danois que je connais. Vous ne me croyez pas ? Allez donc jeter un œil à Solo dance.

Formée à l'origine à la botanique classique, son amour et son inspiration pour le monde végétal se dessinent inévitablement dans la narration visuelle de ses œuvres. Dans sa série Dryads - The tree-bound, disponible sur Foundation, son corps fusionne avec la végétation qui l’entoure. Elle s’efface pour laisser place à un autre personnage, tout aussi silencieux : la Nature. Une référence aux mythes des Dryades grecques. Mon coeur s’est serré quand j’ai vu Rite de passage. Une œuvre très spéciale pour l’artiste qu’elle a créée pour elle et sa fille alors âgée de douze ans. Un moyen de permettre à cette dernière de visualiser l’étape actuelle de sa vie. Cette étape nous parle à toutes. On l’a toutes vécues. Peut-être pas à douze ans. Peut-être pas toutes de la même façon. Mais on comprend. C’est ça être un bon narrateur. C’est créer un récit que n’importe qui soit en mesure de s’approprier.

Breathe quietly so as not to disturb the shadows. Respirez doucement pour ne pas déranger les ombres. C’est cette œuvre qui m’a définitivement décidée à inclure Maria dans ma curation. Je n’ai même pas eu besoin de lire le titre. L’image m’a suffit, je savais exactement de quoi elle parlait. Cette peur de déranger. De prendre trop de place. De se faire remarquer. Cette peur de mal faire. Cette peur qui t’étouffe. Cette petite voix dans un coin de ta tête qui fini par te dire que tu ferais mieux de te taire. Cette peur qui te paralyse. Cette peur absurde qui te terrifie au point que tu n’oses presque plus respirer. Tu te tais. Tu te caches. Tu as presque envie de disparaitre. Alors tu finis par te comporter comme une plante. Jolie, mais immobile. Silencieuse. On est face à un autoportrait et pourtant j’ai comme l’impression de regarder une nature morte. C’est ça le travail de Maria. Ses compositions nous tendent une perche. C’est un début d’histoire, un premier chapitre. A nous d’écrire la suite. Finalement le plus important c'est ce que vous allez faire de ces images.

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